4 Français sur 10 craignent les effets secondaires du vaccin H1N1. StreetPress interview le conseiller délégué chargé de la santé dans le 19e arrondissement.
Aéroport de Roissy Charles de Gaulle (95) – « Le policier m’a dit : “Soit tu montes dans l’avion, soit tu vas en prison”. Je lui ai répondu : “Je dois rester ici, j’ai ma famille et un CDI .“ » Abaeze (1) raconte son histoire en parlant vite, il est encore sous le coup de l’émotion. Il faut dire que les faits sont récents. Jeudi 9 mars, ce cuisinier d’un prestigieux établissement parisien décide de passer quelques jours à Londres pendant ses congés. Il achète son billet EasyJet à destination de l’aéroport de Londres-Luton, et s’apprête à embarquer à l’aéroport de Roissy ; visa, passeport nigérian et titre de séjour en poche.
« Arrivé au check-in, on tamponne mon visa et on me laisse entrer dans la zone internationale », assure le trentenaire. Quand deux agents de la police aux frontières viennent l’embarquer. Ils auraient reproché à Abaeze de détenir un faux titre de séjour . « La loi exige qu’il soit placé en garde à vue dans ce cas », précise maître Mechri, son avocate. Mais ce jeudi soir, les agents auraient pris une toute autre décision :
« Ils ont confisqué mes papiers, sans me donner de document qui l’attestait, m’ont forcé à monter dans l’avion, et m’ont dit : “Va à Londres et tu reviens plus en France !” »
Le parquet n’y a pas cru
Abaeze aurait tenté d’expliquer son cas aux agents : « Je leur ai dit que j’étais en cours de régularisation et que la préfecture avait commencé à m’envoyer des documents. Le policier m’a répondu : “Ce n’est pas mon problème !” ». Il lui aurait même reproché : « Ce n’est pas moi qui ai acheté ton ticket d’avion ! » Heureusement, Abaeze réussit à contacter Pascale, une bénévole de la Ligue des droits de l’Homme ( LDH ), qui l’accompagne depuis plusieurs mois dans ses démarches de régularisation.
Interpellée par la situation, elle le met en contact avec une avocate, maître Mechri. « À ce moment-là, il est tétanisé de peur, assis dans l’avion » , explique cette dernière, « j’ai dû parler avec une hôtesse de l’air puis avec le commandant de bord pour qu’ils le laissent sortir. » Elle ajoute :
« Il a eu beaucoup de chance, l’avion était en retard et c’est ça qui m’a laissé le temps de le sortir de là. »
Outrée de ce qu’il est en train de se passer, maître Mechri contacte le parquet et leur explique l’histoire. Ils n’en reviennent pas . « On ne m’a pas prise au sérieux. » Le parquet lui confirme que la Paf n’a pas le droit de forcer une personne à monter dans un avion sans ses papiers, ni son accord .
Une version que la police tempère. Par l’intermédiaire de son service presse, elle explique qu’Abaeze disposait d’un passeport et d’un visa en règle pour la Grande-Bretagne, mais qu’il avait également une fiche de la préfecture avec interdiction de retour sur le territoire français en plus d’un faux titre de séjour polonais. Selon les agents, Abaeze « n’a jamais été forcé de monter dans l’avion, encore moins en lui confisquant son passeport ».
Démarches de régularisation
Abaeze est finalement placé en garde à vue, puis déféré devant le juge des libertés et de la détention qui classe l’affaire sans suite sans même délivrer d’obligation de quitter le territoire français ( OQTF ). « Le procureur a aussi classé sans suite l’infraction d’usage de faux », continue l’avocate, avant de s’interroger :
« Qu’aurait-il pu lui arriver s’il était arrivé en Angleterre sans aucun papier ? Il aurait été en prison directement là-bas. »
« Abaeze est en cours de régularisation ! » affirme Pascale. « C’est une personne très calme, il n’a aucun problème, il travaille à temps plein, depuis 2013 au black, et depuis 2018 de façon déclarée dans des restaurants de la capitale. » Tous les jours, Abaeze fait quatre heures de transports de son hébergement seine-et-marnais à Paris . « J’ai une petite fille ici. Je ne peux pas partir pour toujours », confie-t-il.
Concernant son titre de séjour, Abaeze affirme ne pas savoir qu’il était faux : « Je l’avais acheté 2.300 euros à un ami polonais il y a quelques mois », justifie celui qui ne gagne que 1.400 euros par mois. Mais pour la bénévole de la LDH , Abaeze « a déconné » : « Je lui avais dit de ne pas voyager tant que ses papiers n’étaient pas en règle ! »
(1) Le prénom a été changé.
Image de Une : photo d’illustration de l’Aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle en 2018, par Benoît Prieur via Wikimedia Commons. Certains droits réservés.
Soutenez


